"Sympathie" chez les éditeurs pour l'initiative contre la SSR
La nouvelle initiative visant à réduire les moyens de la SSR recueille de la sympathie parmi les éditeurs, a montré une table ronde jeudi au Swiss Media Forum. Les groupes privés dénoncent "une distorsion de la concurrence", la SSR appelle à la coopération.
"Tous les médias iront mieux lorsque la SSR se concentrera sur son coeur de métier", a lancé le patron du groupe CH Media Peter Wanner à l'occasion de la traditionnelle "ronde des éléphants" réunissant à Lucerne les dirigeants des grands groupes de presse suisses.
Peter Wanner a ainsi avoué "avoir de la sympathie" pour le texte visant à ramener la redevance radio et TV à 200 francs, présenté en mars dernier par un comité bourgeois. Il a notamment pointé l'offre numérique de la SSR, qui vient concurrencer directement celle des privés. "On a un problème, et il doit être affronté", a dit Peter Wanner, appelant à une discussion entre la SSR et les éditeurs.
"Il y a dans le texte des éléments qu'on soutient", a reconnu pour sa part le directeur général du groupe NZZ, Felix Graf. Une baisse des moyens permettrait à la SSR de se focaliser davantage sur l'essentiel, selon lui.
"C'est un problème qu'on doit résoudre. Il faut s'asseoir autour d'une table et discuter des conditions cadres", a souligné pour sa part le président du TX Group Pietro Supino, rappelant que la somme mise à disposition de la SSR via la redevance équivaut à ce que les éditeurs gagnent ensemble sur le marché.
Marc Walder, le patron du groupe Ringier, a été le seul à se dire opposé à l'initiative. Il a néanmoins appelé la SSR à tenir compte des intérêts des éditeurs. "Il faut trouver des solutions et nous les trouverons", a-t-il déclaré.
Le directeur général de la SSR Gilles Marchand a défendu le rôle de la SSR, dont les programmes sont appréciés du public. Il a rappelé les économies déjà réalisées par l'entreprise après la votation sur l'initiative "No Billag" en 2018.
"Le débat est nécessaire. Cette discussion arrive, pas seulement avec les éditeurs, mais avec l'ensemble de la société", a souligné Gilles Marchand.
Il a appelé les éditeurs à la coopération. "On peut faire des choses ensemble pour que tous en profitent. A la fin, il faut voir l'intérêt global de la branche", a déclaré le Vaudois, rappelant l'initiative pour un login commun lancée en 2018, précisément au Swiss Media Forum. Cet instrument est aujourd'hui réalité.
Au chapitre de la coopération, Pietro Supino a pour sa part appelé ses collègues à conclure une "alliance pour la publicité", un domaine qui a été négligé par la branche ces dernières années, selon lui.
Il a souligné que les groupes de presse avaient certes connu des résultats records en 2021. Des recettes supplémentaires sont toutefois nécessaires afin de continuer à pouvoir financer une offre journalistique, a pointé Pietro Supino.
Les éditeurs se sont par ailleurs inquiétés des pressions venant parfois du monde politique, Felix Graf pointant les aides à la presse comme un moyen de vouloir influencer les médias. Tous se sont accordés sur le fait que la protection des sources n'était pas négociable, et qu'il fallait défendre à tout prix l'indépendance journalistique.
Pietro Supino a néanmoins alerté sur le déficit de confiance à l'égard des médias observé actuellement au sein de la population. Cet état d'esprit s'est manifesté, surtout dans les campagnes, lors de la votation du 13 février dernier sur l'aide à la presse, selon lui.
"La crédibilité est notre capital", a-t-il insisté, ajoutant que les journalistes ne doivent pas être des activistes. Ils doivent observer et expliquer le monde, afin que les gens puissent se faire leur propre opinion. Mais ils ne sont pas des faiseurs d'opinion".