Le Festival de Locarno a pu retrouver une partie de son public
Près de 78'600 personnes ont fréquenté le Festival du film de Locarno, qui s'est terminé samedi soir, soit environ la moitié moins que l'édition 2019 pour ce qui est des salles. En cause, des jauges réduites en raison du Covid et une mauvaise météo en début d'édition.
Presque 30'000 cinéphiles se sont rassemblés devant l'écran XXL de la Piazza Grande, 48'900 dans les salles de cinéma et plus de 8000 personnes ont suivi les offres en ligne des sections "Cinéastes du présent" et Open Doors, peut-on lire dans un communiqué envoyé dimanche par le Festival.
Pour le président du Festival Marco Solari, "la décision de revenir coûte que coûte sur la Piazza Grande s'est avérée gagnante. Plus que le nombre de spectateurs, ce qui compte, c'est l'émotion d'une ville, d'une région, d'un canton...". Le nouveau directeur artistique Giona A. Nazzaro, qui défend un festival "libre, inclusif et surtout populaire", a dit qu'il ne pouvait que "se réjouir et éprouver de la gratitude en songeant à cette première édition".
Après 11 jours, le jury a couronné le cinéaste indonésien Edwin avec le Léopard d'Or pour son film "Vengeance Is Mine, All Others Pay Cash" (La vengeance m'appartient, les autres paient cash). Ce film, qui dresse le portrait d'un jeune homme impuissant et en colère, coincé au milieu des années 80 indonésiennes machistes, n'a pourtant pas fait l'unanimité des critiques sur place.
Ce Léopard d'Or a été choisi parmi 17 films en lice. Un seul film suisse concourait dans cette catégorie: "Soul of a Beast" du réalisateur zurichois Lorenz Merz, qui a reçu une mention spéciale. Il raconte l'histoire d'un père adolescent qui tombe amoureux de la petite amie de son meilleur ami.
Toujours dans la compétition internationale, le prix de la meilleure interprétation féminine revient à l'actrice russe Anastasiya Krasovskaya. Elle fait ses débuts au cinéma dans le rôle principal "Gerda" de Natalya Kudryashova, un film "brouillon" comme l'ont qualifié certains critiques, offrant une "vision sombre de l'espace moderne russe qui ne laisse plus de place à l'épanouissement de l'âme".
La meilleure performance masculine a été réalisée par Mohamed Mellali et Valero Escolar, qui jouaient deux collègues de travail dans "Sis dies corrents" (Hommes à tout faire) de Neus Ballús. Ce film espagnol a fait rire toute la salle, en suivant des hommes de plusieurs nationalités travaillant sur un chantier.
Et c'est Hinterland de Stefan Ruzowitzky, qui a obtenu samedi le prix du public. Ce film autrichien se penche sur l'histoire des soldats rapatriés de la Première Guerre mondiale qui ne trouvent plus leur place dans la Vienne de 1920. "Ils reviennent d'une guerre terrible et doivent ensuite vivre comme des mendiants et des sans-abri parce que le monde qu'ils connaissaient n'existe plus: l'Empire s'est effondré, l'Autriche est une jeune et petite république", explique M. Ruzowitzky.
Cette première édition pilotée par le cinéphile érudit Giona A. Nazzaro, après une édition 2020 anémiée par la pandémie, est saluée par la presse. Le journal genevois Le Courrier estime par exemple que "le festival a retrouvé son rôle de prospecteur du cinéma d'auteur".
Le public s'est vu offrir un programme de près de 200 films, dont une centaine en première mondiale, une dizaine de premières suisses et une vingtaine de premiers longs métrages.
En plus de "Soul of a Beast", un autre film suisse a retenu l'attention: "Monte Verità", de Stefan Jäger. Ce long métrage revient sur l'aventure d'artistes et d'intellectuels, comme l'écrivain Hermann Hesse ou le psychiatre Carl Jung, qui ont fréquenté le Monte Verità au Tessin au début du XXe siècle à la recherche de nouvelles libertés.
Locarno a vu défiler une brochette de célébrités comme la musicienne new-yorkaise Kim Gordon de Sonic Youth, l'actrice française Laetitia Casta ou le scénariste américain John Landis (Léopard d'honneur), à qui l'on doit les Blues Brothers ou le clip Thriller de Michael Jackson. On peut encore citer Gale Anne Hurd, productrice de Terminator ou l'actrice française Françoise Fabian.
Le réalisateur italien Dario Argento s'est encore vu décerner un prix pour l'ensemble de son œuvre samedi soir et son interprétation surprenante dans Vortex du réalisateur argentin Gaspar Noé, un drame sur les amours d'un vieux couple sénile. Avant le clap de fin, les spectateurs ont encore pu voir le film "Respect" de Liesl Tommy , un biopic inspiré de la vie de la chanteuse Aretha Franklin.