Les frères Luyet à la lutte pour le titre national en karting : "On veut faire le spectacle"
La couronne de champion de Suisse de karting en catégorie KZ2 sera attribuée ce week-end. Elle reviendra à coup sûr à un Saviésan. Avant la dernière manche, Jean Luyet devance son frère Samuel au classement général. Les deux frangins seront soutenus par un public nombreux samedi à Wohlen.
260 points pour le premier. 226 pour le second. Les frères Jean et Samuel Luyet abordent la dernière manche du championnat suisse de karting en catégorie KZ2 (karts à commande manuelle) avec un écart de 34 unités. En tête du classement général, ils se disputeront la couronne nationale samedi à Wohlen. Troisième, le Bernois Kevin Wälti (163 points) présente un retard trop conséquent pour prétendre mettre des bâtons dans les roues des deux Saviésans.
Aucune rivalité ni de pression
Si Samuel a remporté deux des quatre manches disputées jusque-là, son abandon lors de la première de la saison risque bien de lui porter préjudice. Avec une victoire et trois deuxièmes places, son aîné s'est appuyé sur une régularité redoutable pour aborder cet ultime rendez-vous en position de force. "Je le connais par coeur et j'aime bien l'embêter, mais je ne lui ferai jamais de coup bas", affirme le cadet. "Je vais donner mon maximum pour remporter cette dernière manche, mais je serais très content que ce soit lui qui décroche le titre." Le sourire aux lèvres, les deux frangins balaient d'emblée tout soupçon de rivalité à l'aube de ce rendez-vous en terres argoviennes. "Je ne suis pas un salaud, je continue à lui parler", se marre Jean. "Notre objectif du début d'année était que l'on termine aux deux premières places et nous sommes en passe de le réaliser. Je ne ressens aucune pression avant cette dernière course. J'espère simplement que ce sera une belle bagarre entre nous. On veut faire le spectacle pour tous les gens qui vont venir nous voir."
À Wohlen, les frères Luyet pourront en effet s'appuyer sur un véritable Fans Club. Pour l'occasion, un bus a été affrété au départ de Savièse. "Recevoir un tel soutien est extraordinaire", s'exclame Samuel. "Cela nous motive trois fois plus sur la piste. Je suis un grand fan de foot, je supporte à fond le FC Sion, donc avoir des fans presque du même niveau que ceux du Gradin Nord, c'est incroyable." Si cette dernière manche du championnat suisse est aussi...la seule à se disputer sur sol helvétique, les deux Valaisans ont déjà pu s'appuyer sur leur public, à renfort d'engins pyrotechniques notamment, lors de certaines courses précédentes. "Les Saviésans, c'est mieux que les Américains pour faire le show!", ose Jean. "Ce sont de vrais fêtards qui mettent une ambiance incroyable dans les tribunes du kart." S'ils se déplaceront en Argovie en amont, les frangins ne ferment pas la porte à un retour en Valais au sein même de leur bus de supporters. "Si tout se passe bien sur la piste, on rentrera avec eux, c'est promis!"
Ce duel fraternel aux commandes du championnat suisse intervient alors que Jean et Samuel Luyet s'alignent pour la première année au sein de l'écurie Birel Art. Une formation italienne qu'ils ont rejoint après trois saisons passées chez Tony Kart, une autre firme transalpine. "Notre contrat était arrivé à échéance et Birel Art nous a donné l'opportunité d'aller courir à Las Vegas. Une expérience folle qui nous a fait découvrir une autre facette du karting. Les Américains veulent du spectacle, des accidents, du danger. Les règles étaient différentes de celles que l'on connaît en Europe. Nous nous sommes immédiatement bien entendus avec les dirigeants de l'écurie et nous avons donc décidé de nous engager pour de bon avec eux."
Des moteurs développés par Jean
Ce voyage dans le Nevada n'est pas l'unique facteur ayant poussé les Luyet à rejoindre Birel Art. L'écurie italienne offrait surtout de belles perspectives à Jean hors de la piste. "Depuis petit, j'ai toujours été passionné par l'automobile et les moteurs. Je rêvais de pouvoir tout contrôler en développant moi-même le moteur sur lequel je m'alignerais en course. Le patron de Birel Art est très disponible, donc je lui ai demandé si je pouvais tenter l'expérience et il a accepté. Développer un moteur ne s'apprend pas. Aucune école n'existe pour ça. Cela se fait en discutant avec toutes les personnes que l'on peut croiser sur les circuits."
Si Jean s'aligne donc sur ses propres moteurs, Samuel fait lui aussi confiance à son frère. "Je n'ai pas trop le choix", rigole-t-il. "Plus sérieusement, je pense que c'est une bonne chose. Nous partions un peu dans l'inconnu à la base. Préparer un moteur est quelque chose de très compliqué et Jean n'a pas encore la même expérience que les autres motoristes du circuit. C'est une aventure de fou." Une aventure pour laquelle le cadet met lui aussi à profit ses compétences professionnelles. "En tant que maçon, je suis actuellement en train de construire un local qui accueillera son banc moteur à Savièse. Il pourra ensuite tout faire depuis la maison. Si les choses se développent et qu'on commence à avoir des clients, je le suivrai en devenant son assistant." Malgré l'enjeu qui "oppose" les deux frangins ce week-end, Samuel ne craint pas un potentiel sabotage de son kart de la part de son aîné. "Pour l'embêter, je lui ai dit que je réfléchissais à louer un moteur à quelqu'un d'autre, mais je sais très bien qu'il va me considérer comme d'habitude. Il ne fera jamais en sorte de me causer des problèmes."
Un stress différent entre le paddock et la piste
Avant de se projeter sur cette dernière manche du championnat suisse, Jean Luyet a mis le cap sur l'Angleterre la semaine dernière où se tenaient les championnats du Monde juniors. Une compétition à laquelle il n'a pas pris part sur la piste, mais depuis le paddock en tant que responsable de la gestion des moteurs chez Birel Art. "Le stress n'est pas le même que sur la piste. Là, je stressais pour une douzaine de pilotes différentes. Tu espères que tout se passe bien pour tout le monde, tu te dois de rester concentrer du début à la fin pour prévenir n'importe quel problème. Lors de nos compétitions, j'ai toujours un oeil sur Samuel. Si je le vois s'arrêter sur le bord de la piste, j'espère à chaque fois qu'il me fasse signe pour me dire que ce n'est pas un souci de moteur." À l'évocation de ces mots, son frère tient à ajouter que "je suis bien plus indulgent avec Jean qu'avec un autre motoriste. Je n'aurais aucune peine à lui pardonner en cas de pépin car je sais qu'il fait toujours le 100% pour moi."
Une fois ce rendez-vous de Wohlen et les festivités qui découleront du titre étant promis à l'un d'eux passés, les frères Luyet se dirigeront vers le Portugal pour y disputer le gros rendez-vous de leur saison : les championnats du Monde de leur catégorie. "Décrocher le titre mondial est notre rêve depuis toujours", clament-ils d'une même voix. "Personnellement, une bonne partie de ma tête est déjà tournée vers cette échéance", admet Samuel. "Les championnats suisses vont surtout servir à rouler et à emmagasiner de la confiance." Les deux Saviésans ne prévoient d'ailleurs pas de se réaligner au niveau national l'an prochain. "Même s'il remporte le titre ce week-end, je ne pousserai pas pour avoir droit à ma revanche. Je finirai devant aux championnats du Monde", conclut le cadet dans un éclat de rires.