Portrait du mois: Pascal Héritier, l'archer qui rêve des Jeux Paralympiques
Nouvel épisode de notre série, dans laquelle on vous propose de découvrir une personnalité valaisanne liée au monde du sport. Aujourd’hui on s’intéresse à Pascal Héritier. Âgé de 52 ans, il s’apprête à participer aux championnats du monde ainsi qu’aux championnats d’Europe de para-tir à l’arc.
C’est dans les mayens de Conthey que nous retrouvons Pascal Héritier. Le Vétrozain d’origine nous accueille dans son chalet où il aime s’entrainer seul avant les grandes échéances. «Je viens ici pour me préparer aux compétitions qui arrivent, pour ne pas être dérangé. Ici il n'y a pas grand monde, à part 2-3 personnes qui viennent marcher ou à vélo, autrement c’est très calme donc j’aime bien (rires).» Il ajoute en rigolant. «Ma femme n'aime pas quand je reste trop longtemps en haut tout seul. Mais elle va quand même bientôt monter me voir.»
Une passion découverte sur le tard
C’est en 2014 que Pascal Héritier découvre le tir à l’arc. Un an plus tôt, il subit plusieurs opérations pour traiter une tumeur cérébrale bénigne qui va le rendre dépendant d’un fauteuil roulant. C’est un peu par hasard que l’ancien carreleur de profession va découvrir ce sport. «C’est le fait de n’avoir rien à faire, car l’AI n’a pas voulu me financer une reconversion. Donc je suis resté homme au foyer pendant quelques temps et puis je suis tombé sur le tir à l’arc par hasard. Je suis allé faire un essai et ça m’a beaucoup plu, tout de suite.»
S'il n'était pas un grand sportif auparavant, Pascal Héritier nous avoue avoir découvert une nouvelle facette de sa personnalité: son côté compétitif. «Je n'aimais pas ça, c’était vraiment pas pour moi. Mais maintenant que j’ai mis les pieds dedans, je n’ai plus du tout envie d’en sortir.» Aujourd’hui, le Vétrozain s’entraine entre 5 et 6 heures par jour et se rend régulièrement à Tenero (TI) afin de se préparer au mieux avec l’équipe helvétique. «Cela fait plus de 3 ans maintenant que je fais tous ces entrainements. On a la possibilité d’avoir les entraineurs de l’équipe de Suisse des valides qui viennent d’Italie, donc on fait quasiment la moitié du chemin et on s’entraine pendant 3-4 jours toutes les 3 semaines.»
La patience, un atout majeur
Le tir à l’arc, un sport dont tout le monde connait le nom mais où peu de gens savent la difficulté. Comme nous l’explique Pascal Héritier, la mécanique de l’arc est complexe et demande quelques connaissances en plus. «Parfois quand on m’explique quelque chose sur l’arc, j’ai de la peine à comprendre. Certains sont tellement dans la mécanique de précision que j’ai dû apprendre. Mais ça m’a beaucoup plu parce qu'il y a tellement de paramètres, de réglages et l’arc est impeccable pour la chaise roulante.» Mais un bon arc n’est pas suffisant pour réaliser de bonnes performances. Beaucoup d’entrainements sont nécessaires, refaire les mêmes gestes les uns après les autres est encore plus important. Il ajoute en rigolant: «Beaucoup de gens disent que le tir à l’arc n’est pas un sport alors je leur répond qu'ils viennent essayer et on verra si ce n'en est pas un. Ils ne savent pas la difficulté et le mental nécessaire pour faire ce sport.»
«Le tir à l’arc c’est vraiment comme des vagues, un jour ça va, un jour ça va plus, mais le principal c’est de continuer à travailler.» Pascal Héritier
S’il y a bien une chose que les archers ont absolument besoin pour faire du tir à l’arc, c’est de la patience. Et il existe souvent deux catégories de personnes: ceux qui sont déjà patients et qui sont tout de suite bons ou ceux qui ne le sont pas mais qui l’apprenne en faisant du tir à l’arc. Notre Vétrozain avoue faire partie de la deuxième catégorie et avoir eu beaucoup de mal lorsqu'il a commencé. «Au tout début j’étais tellement impatient que je m’énervais seulement parce que ça n'allait pas comme je le voulais. À force de pratiquer, j’ai progressé. Le tir à l’arc c’est vraiment comme des vagues, un jour ça va, un jour ça va plus, mais le principal c’est de continuer à travailler.»
L'apprentissage de la vie
Pascal héritier, qui a déjà participé aux championnats d’Europe, nous confesse avoir de grandes ambitions grâce à ce travail réalisé. «Ce sport m’a aidé à réaliser quelque chose que je n’avais jamais fait. Et maintenant je sais pourquoi je m’entraine, pour aller aux championnats du monde, aux championnats d’Europe et bien évidemment mon but ultime: aller aux Jeux Paralympiques. C’est ça qui me motive.»
«Dans les grandes compétitions, ce qui me plait le plus c'est de voir les autres catégories et de découvrir comment ils font pour pratiquer.» Pascal Héritier
«Dans les grandes compétitions, ce qui me plait le plus c’est de voir les autres catégories et de découvrir comment ils font pour pratiquer, c’est vraiment extraordinaire», lance-t-il. Dans ces compétitions, tous types de personnes en situation de handicap s’affrontent et elles ce sport de manière différente. «J’ai mon ami Piotr Van Montagu qui tire sans bras et sans jambes. La première fois que je l’ai croisé, je me suis arrêté pour le regarder. Et quand j’ai vu tout ce qu’il devait faire pour réussir à tirer sa flèche, je me suis dit que ce n’était pas possible. C’est juste extraordinaire.» Le sportif de 52 ans admet que ce genre de compétitions l’aide également à accepter son handicap. «Quand t’entends des gens qui se plaignent parce qu’ils ont dû couper un doigt et qu’après tu vas le voir lui (ndlr: son ami Piotr Van Montagu) tu relativises. Une personne comme ça c’est vraiment extraordinaire.»
Prochains rendez-vous
Cet été, deux grandes compétitions attendent le Vétrozain. D’abord les championnats du monde à Pilsen, en République tchèque auxquels il va participer pour la première fois du 17 au 23 juillet. Et sa deuxième participation aux championnats d’Europe à Rotterdam du 14 au 20 août. «Je ne sais pas si je devrais avoir des attentes. Je trouve que le plus important c’est de prendre l’expérience de ces grands rendez-vous.»
«Je trouve que le plus important c’est de prendre l’expérience de ces grands rendez-vous.» Pascal Héritier
Lorsqu'on évoque les Jeux Paralympiques, c’est avec les yeux pleins d’étoiles qu’il nous confie son rêve. «C’est mon but ultime. En 2024 ou en 2028, j’aimerais beaucoup participer, c’est mon but depuis toujours. Ce sera le dernier truc que je ferai. Après, à partir de 60 ans je pense que tu ne fais plus de sport à haut-niveau (rires).» L’association Suisse de paraplégiques l’aide à financer une grande partie de sa préparation et quelques sponsors le soutiennent également. «Les petits pas font les grands pas», conclut Pascal Héritier.