Initiative 99%: justice sociale ou piège fiscal?
Les comités du « oui » et du « non » à l’initiative dite « 99% » lançaient ce jeudi matin leur campagne. Du côté de la gauche, on évoque un texte qui rend justice aux contribuables modestes et aux travailleurs; de l'autre, on dénonce un piège fiscal pour la classe moyenne. Tour d'horizon.
L’initiative dite « 99% » (« Pour alléger les impôts sur les salaires, imposer équitablement le capital ») a mobilisé la classe politique valaisanne ce mercredi matin. Le comité du « pour » et celui du « contre » lançaient officiellement leur campagne cantonale en vue des votations fédérales.
Le texte des Jeunes socialistes veut augmenter le taux d’imposition sur le revenu du capital. Par revenu du capital, on entend les dividendes ou les intérêts sur des placements, des gains en capitaux - à la vente d’un bien par exemple - ou encore les revenus locatifs.
Un seuil minimal devrait être fixé pour éviter de pénaliser les contribuables les plus modestes. Les initiants parlent de 100'000 francs. En clair : si ce que vous touchez annuellement grâce à vos investissements n’excède pas les 100'000 francs, vous ne devriez pas être touchés par cette réforme fiscale, selon les Jeunes socialistes.
Une «marge de manœuvre» pour le parlement
Ce montant de 100'000 francs n’est toutefois pas officiellement énoncé par l’initiative. Les opposants évoquent donc un manque de clarté du texte. Ils lui reprochent aussi de rester flou sur le montant exact des recettes supplémentaires qui en découleraient et sur les domaines qui bénéficieront de la redistribution. « Si on avait fait quelque chose de très précis, on nous aurait reproché d’être trop précis pour un texte constitutionnel. C’est une force de l’initiative de laisser une marge de manœuvre dans son application. La loi peut prévoir toutes les exceptions possibles qui seraient cohérentes avec le paysage économique suisse. Si l’initiative passe, le seul message qu’on envoie politiquement est que les revenus du capital doivent être plus fortement imposé que les revenus du travail à partir d’un certain montant », rétorque Clément Borgeaud, président du Parti socialiste du Valais romand.
De son côté, le conseiller national vert Christophe Clivaz ajoute que les opposants essaient de faire peur à la population en prétendant que l’initiative, si elle était acceptée, serait une catastrophe pour l’économie nationale.
Les initiants parlent d’un revenu fiscal supplémentaire d’environ 10 milliards de francs grâce à ce projet constitutionnel, mais cela ne suffit pas à convaincre le camp du « non ». Pour le conseiller national du Centre, Sydney Kamerzin, l’initiative est idéologique: il s'agit simplement de taxer les plus riches, sans vraiment définir à quoi servira l'argent récolté. «Le texte vise à plus de prospérité sociale, explique le Valaisan, mais qu'est-ce que veut dire la prospérité sociale? Est-ce qu'on parle de climat? Est-ce que l'on veut plus de prestations sociales? Est-ce qu'il faudrait plus d'infrastructures de loisir? En général, le pouvoir politique législatif décide d'introduire l'impôt dans un but précis. Là, il n'y en a pas. C'est le principal problème de cette initiative.»
«De la jalousie de la part de la gauche»
Pour ce comité, dont les membres sont issus du PLR, du Centre/PDC et de l’UDC, il y a également un problème statistique. Le chiffre de 1% correspondant à la population touchée par cette initiative est trop bas. Le camp bourgeois estime que la gauche oublie une partie des propriétaires, qui seraient ponctionnés d'une somme supplémentaire en cas de vente de leur maison familiale ou encore les entrepreneurs et les patrons de PME qui devraient trouver des fonds supplémentaires en cas de succession. «Le chiffre de 60'000 personnes concernées en Suisse, je n'y crois pas, réagit Blaise Melly, député UDC. Cette initiative veut simplement pointer du doigt une partie de la population et leur attribuer tous les maux. C'est simplement de la jalousie.»
Quant au fait de taxer davantage le «revenu du capital» par rapport au «revenu du travail», cela n'a pas de sens pour les opposants au texte. «Nous sommes évidemment attachés à la valeur travail, précise Blaise Melly. Mais il faut également valoriser le capital, notamment parce qu'il s'agit de revenu accumulé, d'épargne. Ce sont donc les deux notions ensemble qui produisent de la richesse.»
La population suisse devra se prononcer le 26 septembre prochain sur cette initiative «99%» ainsi que sur le «mariage pour tous».