Les ministres français prennent leur fonction, le PS hausse le ton
Les ministres du gouvernement de François Bayrou ont commencé à prendre leurs fonctions mardi, à la veille de Noël, mais déjà le parti socialiste n'exclut plus de le censurer rapidement au nom d'une trop grande "dépendance" au bon vouloir de l'extrême droite.
Au lendemain de la présentation du nouveau gouvernement, les passations de pouvoir se sont enchaînées. Au ministère de la Justice, un revenant a fait sa rentrée: Gérald Darmanin. Le nouveau garde des Sceaux a promis de travailler "main dans la main" avec le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau, l'un des 19 ministres du gouvernement Barnier reconduits.
Il a promis de faire du narcobanditisme et du trafic de drogue sa "priorité absolue", et déclaré donner dans les prochains jours des instructions "très fermes" aux procureurs.
Plus tôt, c'est l'ex-Première ministre Elisabeth Borne qui a pris possession d'un large ministère de l'Education et de la Recherche. Lors de cette passation, elle a lancé un appel très politique à "trouver la voie de la stabilité institutionnelle".
Autre ancien chef de gouvernement, Manuel Valls, aux Outre-mer, a promis de faire de Mayotte et sa reconstruction une "urgence". Il a annoncé se rendre avec le Premier ministre "le plus vite possible" dans le territoire ravagé par le passage du cyclone Chido.
Il a été reçu dans la foulée à Matignon, a constaté un journaliste de l'AFP. Tout comme le nouveau ministre de l'Économie Éric Lombard, qui avait pris ses fonctions dès lundi.
L'ancien directeur de la Caisse des dépôts et consignations, présenté par François Bayrou comme un homme de gauche, avait immédiatement appelé à "traiter notre mal endémique, le déficit".
Nouveau budget, censure
Ce sera le premier défi de l'équipe Bayrou: faire passer un budget pour 2025 à l'Assemblée nationale, là même où le 4 décembre son prédécesseur Michel Barnier a été renversé par une motion de censure.
Le nouveau Premier ministre espère que la présence de poids lourds dans son équipe permettra de l'en prémunir. Il n'a pas prévu en tout cas de demander la confiance le 14 janvier à une Assemblée fracturée.
"Je suis persuadé que l'action que je définis devant vous et l'équipe gouvernementale feront que nous ne serons pas censurés", avait déclaré lundi le chef centriste quelques heures après la présentation de son gouvernement.
"Aucune des conditions du pacte de non-censure n'a été respectée" dans la composition du nouveau gouvernement, a néanmoins répliqué mardi le chef du PS Olivier Faure, "il n'y a aucune raison d'accorder quoi que ce soit à ce gouvernement".
Le responsable socialiste, qui avait accepté de négocier une sorte de pacte de non-agression avec François Bayrou, a regretté que ses demandes n'aient pas été entendues: "pas de dépendance à l'extrême droite, plus de passage en force au 49.3 et un changement de cap".
Il a précisé que son groupe pourrait voter la censure dès la déclaration de politique générale. La France insoumise (LFI) a d'ores et déjà annoncé son intention de déposer une motion de censure, Mathilde Panot a critiqué une équipe remplie "de gens désavoués dans les urnes et qui ont contribué à couler notre pays".
Xavier Bertrand
Mais le Rassemblement national, groupe le plus nombreux à l'Assemblée, a de nouveau répété qu'il ne censurerait pas a priori le nouveau gouvernement.
Marine Le Pen a cependant assuré mardi dans un message vidéo que les Français seraient amenés "bientôt, très bientôt, au pire dans quelques mois" à choisir "une nouvelle voie". Et le président de son parti Jordan Bardella n'a pas mâché ses mots contre la liste gouvernementale: "Heureusement que le ridicule ne tue pas" car "François Bayrou a réuni la coalition de l'échec".
Du côté des Républicains (LR), qui demeurent au gouvernement, Laurent Wauquiez a évoqué un soutien "très exigeant" à François Bayrou qui pourrait être "retiré" en fonction du cap affiché.
Au sein du parti de droite, le président des Hauts-de-France Xavier Bertrand avait annoncé lundi une heure avant l'annonce du gouvernement qu'il n'en ferait pas partie "en raison de l'opposition du Rassemblement national". Il avait dénoncé dans un communiqué un gouvernement "formé avec l'aval de Marine Le Pen".
Et François Bayrou a dû démentir la rumeur d'un échange téléphonique avec Marine Le Pen dans les derniers réglages de la composition du gouvernement.
L'équipe gouvernementale compte 35 membres, légèrement plus resserrée que celle de Michel Barnier (42) et quasiment paritaire avec 18 femmes et 17 hommes. Un premier Conseil des ministres est prévu après les fêtes, le 3 janvier.