L'opposition de gauche en tête au Kosovo
Le parti d'opposition de gauche en tête au Kosovo
Un parti d'opposition de gauche semblait en passe de remporter les législatives au Kosovo dimanche devant la vieille garde des commandants. Selon des sondages réalisés à la sortie des urnes, Vetevendosje aurait obtenu entre 41% et 53% des suffrages.
Ces élections anticipées, les cinquièmes depuis la proclamation d'indépendance de l'ancienne province serbe en 2008, étaient organisées alors que la pandémie du coronavirus s'aggrave.
L'épidémie a également exacerbé les maux économiques et sociaux du territoire d'1,8 million d'habitants où le salaire moyen est de 500 euros environ et où les jeunes, confrontés à un taux de chômage de 50%, cherchent massivement leur salut dans l'émigration en Suisse ou en Allemagne.
La soif de changement est incarnée pour beaucoup par Vetevendosje (VV) ou "autodétermination", le mouvement réformiste de gauche d'Albin Kurti parti en guerre contre la corruption.
Selon les sondages réalisés à la sortie des urnes par quatre chaînes de télévision, le principal parti d'opposition aurait remporté entre 41 et 53% des voix. Le PDK établit par d'anciens commandants rebelles de la guerre d'indépendance contre les forces serbes (1998-99) ainsi que la LDK de centre-droit auraient recueilli quant à eux entre 15 et 20% des suffrages.
Les partisans d'Albin Kurti accusent les ex-guérilleros de captation des ressources de l'Etat et d'avoir gâché les premières années d'indépendance du territoire peuplé à majorité d'Albanais.
"Les gens attendent le changement, ils attendent la fin des problèmes qui nous empoisonnent, comme la corruption et le népotisme", a dit à l'AFP Sadik Kelemendi, médecin, avant de voter dans le froid et la neige. "Il faut aussi qu'on se consacre à la lutte" contre un virus qui a fait plus de 1500 morts et manque de submerger des services de santé fragiles, ajoute-t-il.
L'ex-rébellion est partie au combat électoral handicapée par l'absence de plusieurs grandes figures comme l'ancien président Hashim Thaçi, inculpé en novembre par la justice internationale pour crimes de guerre pendant et après le conflit contre les forces serbes.
En face, VV a reçu le renfort de la présidente par intérim Vjosa Osmani, 38 ans, symbole d'une classe politique nouvelle génération qui a quitté la LDK de centre-droit du Premier ministre sortant Avdullah Hoti.
Vetevendosje avait fini en tête aux deux dernières législatives mais avait été évincé par des coalitions conclues par d'autres. En 2020, le gouvernement d'Albin Kurti, tribun redoutable qui a passé deux ans dans les geôles de Slobodan Milosevic, avait tenu une cinquantaine de jours avant d'être renversé.
Cette fois, son mouvement est crédité d'une cinquantaine de sièges et peut espérer constituer une majorité de gouvernement s'il s'allie avec les partis représentant les minorités, qui disposent de 20 sièges sur 120 au Parlement. Le PDK et la LDK auraient obtenu une vingtaine de sièges chacun.
Tous ne soutiennent pas la totalité du programme d'un mouvement connu autrefois pour ses manifestations violentes et sa rhétorique anti-occidentale, relèvent les analystes. Albin Kurti est accusé par ses adversaires de visées "dictatoriales" et de représenter une menace pour la relation privilégiée entre le Kosovo et les Etats-Unis.
Albin Kurti a été interdit par les autorités de se présenter personnellement en raison d'une condamnation pour avoir jeté des gaz lacrymogènes à l'Assemblée. Mais cela ne l'empêcherait pas de former un gouvernement en cas de succès.
Albin Kurti, tenant de la ligne dure face à Belgrade, aurait dans ce cas à poursuivre un difficile dialogue avec la Serbie, censé normaliser les relations avec Belgrade, qui refuse toujours de reconnaître l'indépendance de son ancienne province. Plus de 20 ans après la guerre, cette question non résolue est source de tensions dans la région et un obstacle aux rêves d'Union européenne de Belgrade comme de Pristina.