L'irrigation à distance des prairies bientôt une réalité?
Agriculteurs, chercheurs et entrepreneurs ont collaboré durant tout l’été dans l'Entremont. Résultat: entre 30 et 50% d'eau économisés. Un outil numérique pour faciliter l'arrosage pourrait également être proposé aux agriculteurs d’ici la fin de l’année.
Savoir quand arroser, et combien : c'est le défi quotidien de nombreux agriculteurs durant la belle saison.
Gérer l'arrosage à distance
Le projet ODILE (Optimisation de l'irrigation dans l'Entremont) tente d'y apporter une réponse. Lauréat du BlueArk Challenge 2020, il a été mis sur pied par le BlueArk Entremont, la fondtaion The Ark, ainsi qu'Altis au Châble. La solution ODILE permet d’apporter la bonne quantité d’eau au bon moment, en fonction du besoin des plantes et du sol. Au final, c’est une économie de temps et d’eau, sans pour autant diminuer la productivité. «D'une part, nous voulions offrir une solution pour pouvoir ouvrir et fermer les vannes d'irrigation à distance, et n'arroser que quand le sol et la plante en ont besoin», explique Eric Girardin, porteur du projet ODILE. «D'autre part, offrir une aide à la décision, pour permettre à l'agriculteur de décider quand, combien et où il faut irriguer.»
L'automatisation des cannes d'arrosage a également pour but d'éviter à l'agriculteur de se déplacer sur chacune de ses parcelles pour ouvrir la vanne, puis de repasser plus tard pour la fermer. «Il peut maintenant le faire via son smartphone, en cliquant simplement sur un bouton.»
Six agriculteurs ont joué le jeu
Pour les besoins de cette expérience, six agriculteurs des communes d’Orsières, de Liddes et de Val de Bagnes ont mis chacun une parcelle à disposition. Pour déterminer les besoins en eau de ces parcelles, des capteurs d'humidité ont été placés dans le sol. Les données récoltées ont permis de déterminer la composition du sol et les besoins de la plante. Selon les indicateurs obtenus, le système d'arrosage a ensuite été entièrement automatisé.
«Sur la partie gérée par le projet ODILE, ils ont utilisé moins d'eau que nous. Cette solution pourrait diminuer notre charge de travail.» Denis Coppey, agriculteur à Orsières
Comme le canton doit produire 75% de fourrage de base pour garantir le raclette AOP, l’enjeu était de taille, particulièrement avec un été sec comme celui de cette année. «On voit que sur la partie gérée par le projet ODILE, ils ont tout de même utilisé moins d'eau que nous, sur les autres parcelles», reconnaît Denis Coppey, agriculteur sur la commune d’Orsières. «Les rendements sont à peu près identiques. En faisant plusieurs séances, on pourra certainement mettre en place une solution pour pouvoir diminuer notre charge de travail.»
Denis Coppey le rappelle, pour arroser, il doit apporter asperseurs et tuyaux sur place, et les déplacer deux à trois fois sur les différentes parcelles. «C'est beaucoup de travail, avec les foins qui s'ajoutent en été. L'arrosage des prairies représente une à deux heures le matin, et la même chose le soir, vers 19h après ma journée de travail.»
Jusqu'à 50% d'économie d'eau
Pour les agriculteurs, le premier avantage de ce projet reste donc le gain de temps. Et l’expérience de cet été a montré que cette solution permet d’économiser entre 30 à 50% d’eau, tout en garantissant la production de fourrage. «Je suis très content. On a une solution qui permet de rassurer l'agriculture dans des étés compliqués comme cette année. C'est la garantie d'avoir tout de même un rendement», précise Eric Girardin.
«Avec les économies d'eau réalisées, ce système peut apporter une grosse plus-value aux communes.» Eric Girardin, porteur du projet ODILE
L’aide à la décision, sous forme de plateforme en ligne, devrait être proposée aux agriculteurs d'ici à la fin de l’année. La partie technique, soit les cannes d’arrosage connectées, nécessite encore un peu de travail, afin de proposer ce produit à un prix qui soit abordable.
Les résultats de l'expérience réalisée cet été dans l'Entremont ont été présentés au canton. Le projet pourrait également intéresser également les communes et les consortages.
ODILE, c'est une collaboration entre quatre partenaires. Deux partenaires du milieu académique: le Centre alpien de phytogéographie (CAP) au jardin botanique Flore-Alpe à Champex-Lac, et le Global Mountain Biodiversity Assessment (GMBA), un réseau international de chercheurs.
Et deux partenaires privés: la société Orbiwise, spécialisée dans les télécommunications, et Hydrolina, spécialisée dans la gestion de l'irrigation et le sol.